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Résumé : Défense passive à grande échelle, échange des otages
contre des membres du gouvernement et arrêt du processus de
colonisation en Cisjordanie : voilà ce qu'aurait fait un
gouvernement israélien compétent et responsable.
Un
peu de dystopie : imaginons un gouvernement israélien
compétent et responsable.
Préambule
: Le Hamas est une organisation terroriste d'inspiration
religieuse, qui ne représente ni le peuple ni l'intérêt
des palestiniens. Il doit être combattu par des moyens qui
l'affaiblissent à terme, au lieu de le renforcer.
Au soir du 7 octobre, Netanyahou et son gouvernement savaient
que :
- ils avaient été avertis plusieurs fois de la préparation
d'opérations offensives du Hamas,
- les ballons d'observation de haute altitude au-dessus de
Gaza étaient hors service depuis quelques semaines,
- les effectifs de Tsahal étaient réduits autour de la bande
de Gaza le 7 octobre, pour deux raisons : a) un renforcement
des effectifs militaires en Cisjordanie pour soutenir les
actions des colons israéliens et b) les religieux au
gouvernement avaient demandé, et obtenu, que de nombreux
soldats puissent effectuer la fête religieuse du 7 octobre
dans leurs familles; les effectifs de l'armée étaient donc
sensiblement réduits autour de Gaza ce jour-là.
- les atrocités commises par le Hamas lors de son raid, encore
renforcées par la prise de plus de deux cents otages, avaient
été volontairement extrêmes pour faire perdre la tête à la
société et au gouvernement israélien et les précipiter dans un
piège.
Cette attaque réussie du Hamas prouve incontestablement que le
gouvernement israélien a gravement failli dans le domaine de
la sécurité, alors que cela a toujours été le point central de
sa politique et de toutes les campagnes électorales de son
dirigeant actuel. L'attaque du 7 octobre est la preuve que
cette stratégie de la sécurité maximale, basée sur le rapport
de force permanent et la division des palestiniens, est
inefficace et mortifère à terme. Pourtant, c'est toujours la
même stratégie du rapport de force qui est à l'oeuvre par
l'entrée des chars dans Gaza, avec les résultats que l'on
devine : de probables succès militaires, une partie des otages
libérés, et la création des conditions nécessaires à
l'arrivée, à Gaza et ailleurs, de plusieurs générations
futures de féroces combattants anti-Israël, sans parler du
déclenchement d'une vague inédite d'antisémitisme au niveau
mondial.
Si le gouvernement d'Israël avait été compétent et
responsable, voici ce qu'il aurait fait, au lendemain du 7
octobre : il aurait compris -enfin- que cette stratégie
sécuritaire de court terme, renouvelée depuis plusieurs
décennies, s'avérait finalement être une erreur, car
produisant aujourd'hui des effets bien pires que ceux
combattus : un renforcement massif d'un de ses opposants les
plus extrêmes et les plus dangereux. Il aurait cherché à
éviter l'escalade en analysant objectivement la situation.
Car objectivement, l'attaque du Hamas, aussi soudaine,
puissante et barbare qu'elle soit, ne met aucunement en danger
la sécurité globale du pays, qui n'est attaqué ni par la terre
(il est facile à Tsahal de refermer hermétiquement la bande de
Gaza sans y rentrer), ni par les airs (le Hezbollah ne dispose
pas d'avions de combat), ni par la mer (ni le Hamas ni le
Hezbollah n'ont les moyens maritimes nécessaires). Rien à voir
avec l'Ukraine, attaquée massivement sur son sol en profondeur
par les nombreuses colonnes de chars russes soutenus par
l'aviation. Au plan militaire, seul reste pour Israël le
problème des roquettes et missiles tirés sur son territoire,
dont une grand part peut être neutralisés par leur système de
défense anti-aérienne, renforcé au besoin par les systèmes des
USA ou d'autres alliés. Ainsi, un principe de défense passive
à grande échelle aurait pu être mis en place le 8 octobre. Ne
restait que le problème des otages. Pour le résoudre, il y
aurait eu une solution simple : un échange de tous les otages
contre un groupe de ministres israéliens, dont le premier, qui
porte une lourde responsabilité dans la mise en place de
l'engrenage fatal. Voilà ce que ferait un gouvernement
compétent et responsable, comme le faisaient jadis les
capitaines de navires : assumer personnellement sa charge et
ses erreurs, en se livrant au Hamas et en mettant ainsi à
l'abri deux cent quarante otages civils. Il est très probable
que le Hamas aurait accepté l'échange, étant donnée la grande
valeur symbolique de la prise de guerre.
Dans le même temps, et pour préparer une solution politique
basée sur la reconnaissance des droits de son voisin, le
gouvernement israélien aurait pu déclarer de manière
unilatérale un arrêt du processus de colonisation en
Cisjordanie. Ce signal aurait pu modifier en profondeur
l'opinion palestinienne, pour affaiblir le support qu'elle
apporte au Hamas.
Mais, comme le monde entier pouvait le deviner à l'avance,
cette équipe gouvernementale dirigée par Netanyahou est tombée
directement dans le piège tendu, en lançant des opérations
militaires de grande ampleur qui provoquent un massacre parmi
les civils de Gaza, que l'opinion internationale ne pourra
jamais oublier. Le gouvernement israélien vient encore de
prouver qu'il n'est ni compétent ni responsable. Il y a
plusieurs raisons à cela.
La première raison est que les israéliens surjouent
systématiquement leur besoin de sécurité, pour des raisons
liées à l'histoire du pays, menacé de destruction dès sa
création et pendant plusieurs décennies ensuite. Pourtant, ils
ont largement prouvé que leur armée est la plus puissante de
la région, ils disposent du feu nucléaire et de surcroît, ils
sont épaulés par les USA. Objectivement, et comme indiqué
précédemment, ils n'ont plus aucune raison d'entretenir en
permanence cette peur viscérale de la destruction de leur
pays. Ce sont les responsables politiques israéliens, et en
premier lieu Netanyahou, pour se faire réélire, qui ont mis en
place depuis plusieurs décennies les politiques sécuritaires
les plus primaires et les plus imbéciles. Le point culminant
de cette politique ayant été l'assassinat de Y. Rabin par un
extrémiste religieux juif, qui a infléchi a jamais le destin
de ce pays.
La seconde raison provient du messianisme religieux. Porté au
départ par le projet sioniste progressiste d'inspiration
laïque, popularisé à l'international par le modèle des
kibboutzim, le pays s'est lentement transformé en un régime
d'inspiration fondamentaliste religieuse juive. La "seule
démocratie du Moyen-Orient" est devenue peu à peu une bastille
assiégée (au début avec raison), portée par une vision
religieuse du monde qui l'a rendue sourde et aveugle aux
besoins légitimes de ses voisins palestiniens. Le projet
sioniste a ainsi développé progressivement une volonté
expansionniste en Cisjordanie, qui s'est
transformée en projet colonial pur et simple, entretenu par
tous les gouvernements successifs. Le drame absolu de ce pays
est que le monde entier s'est rendu compte qu'Israël, bien que
se considérant comme un modèle de démocratie éclairée à
l'occidentale, n'est plus en fait, en Cisjordanie,
qu'un pouvoir néo-colonial porté par les religieux
juifs.
La troisième raison est plus triviale : le mode de
représentation principal en Israël, l'élection des députés à
la Knesset, se fait sur la base d'un scrutin proportionnel. Le
résultat est que, pour réaliser des coalitions de
gouvernement, le principal parti de droite, le Likoud, a dû,
depuis les années quatre-vingt-dix, s'associer avec les partis
de l'extrême-droite religieuse, "faiseurs de majorités". Il
s'en est suivi que les gouvernements ont piloté de manière
assumée une dérive régulière et inexorable vers la droite de
plus en plus extrême, tant dans le domaine social (au départ
sociale, Israël est maintenant une société ultra-libérale) que
dans le domaine sécuritaire (notamment par l'encouragement
constant aux colonies de peuplement en Cisjordanie, censées
contrebalancer le déficit démographique global et "sécuriser"
la Cisjordanie par une présence juive importante). On rejoint
ici le point précédent : aveuglé par le projet messianique,
partie intégrante des coalitions politiques successives, ce
pays a constamment encouragé la colonisation en
Cisjordanie, avec le soutien "indéfectible" des USA,
modèle d'impérialisme mondial.
Observons enfin, comme quatrième raison, un phénomène
incompréhensible au sein d'une "vraie" démocratie : le
principal responsable des politiques de sécurité mises en
oeuvre depuis quinze ans dans ce pays, et qui ont à l'évidence
totalement échoué, reste en place et n'envisage pas une seule
seconde de démissionner. Qu'y a-t'il dans le cerveau de
Netanyahou pour qu'il soit à ce point inconscient de sa propre
responsabilité ? Quand on sait qu'il a accusé publiquement les
ministres de la défense et de la sécurité pour leur
incompétence le 7 octobre, et qu'il n'envisage pas un instant
de dire qu'il a lui-même une place dans ce désastre, on reste
muet de stupéfaction. Le peuple israélien a à sa tête un grand
malade mental, un champion du déni.
Défense passive à grande échelle, échange des otages contre
des membres du gouvernement, arrêt de la colonisation en
Cisjordanie : voilà ce qu'aurait fait un gouvernement
israélien compétent et responsable. Cela aurait mis un coup
d'arrêt à l'engrenage de la violence, et montré au monde
entier que Tsahal était capable d'épargner de très nombreuses
vies civiles à Gaza. Cela aurait permis de de cantonner le
pouvoir de nuisance du Hamas. Cela aurait permis de refonder
en profondeur la politique sécuritaire d'Israël, en prenant en
compte, enfin, le principe de "la paix contre les
territoires". Cela aurait permis à Israël de montrer que ce
n'est plus une puissance néo-coloniale en
Cisjordanie, réduisant ainsi au silence les
antisionistes et antisémites du monde entier. Cela aurait
permis, enfin, de refonder les conditions du dialogue entre
israéliens et palestiniens (le Hamas étant évidemment exclu),
permettant d'ouvrir une nouvelle ère au Moyen-Orient.
1/7 Force est de reconnaître que le #Hamas est en train de
réussir un coup de maître. Frapper Israël exactement à son
point faible, au bon endroit et au bon moment, et enfoncer la
lame si loin que le pays attaqué devient ivre de rage et perd
le peu de discernement qu’il lui reste. #Israël va donc faire
exactement ce que veut le Hamas : s’enfoncer à pied dans la
ville de #Gaza, pour des combats de rue qui seront très durs
et très meurtriers, notamment pour les civils.
2/7 Mais, des civils, le Hamas s’en fout complètement. Tsahal,
contrainte à une guerre urbaine de plusieurs mois, va
concentrer ses efforts sur Gaza, et ainsi dégarnir les autres
fronts où ses ennemis sont en embuscade (Nord avec le
Hezbollah, Golan avec la Syrie, Est avec la Cis+Jordanie).
Etant donné le niveau de préparation et de coordination de
l’attaque du Hamas, il est très probable qu’une organisation
globale a été planifiée, visant justement à affaiblir les
autres fronts.
3/7 Voilà pourquoi le front Nord reste calme : le Hezbollah
attend patiemment que l’armée israélienne s’enfonce loin dans
Gaza, et enregistre des pertes importantes, pour lancer son
attaque au Nord. Il est possible qu’alors se produise aussi un
soulèvement en Cisjordanie, soutenu par la Syrie et la
Jordanie. On imagine le désastre possible.
4/7 Voilà comment un gouvernement incompétent et corrompu,
dirigé par un mafieux notoire et des religieux illuminés, met
en péril une nation entière, en n’ayant pas d’autre politique,
depuis bientôt trente ans (après les accord d’Oslo), que celle
de la vengeance et de la punition collective qui ne crée
qu’une seule chose : la haine. En fait, le Hamas n’a pas tant
de mérite que ça : il est tellement facile de prévoir à
l’avance la réaction du gouvernement d’Israël ! Trop facile !
5/7 Le seul espoir qui reste est un changement complet de
stratégie d’Israël à l’occasion de cette crise. Au cours de
cette guerre qui va se dérouler sur plusieurs mois, au cours
desquels la victoire se dessinera progressivement (grâce en
partie aux USA), l’opinion publique israélienne va peut-être
changer. Elle va être influencée par deux tendances contraires
: d’une part le soulagement de la victoire et la
reconnaissance envers le gouvernement d’union nationale, ...
6/7 … et d’autre part le souvenir de la responsabilité directe
du gouvernement Netanyahou dans la faiblesse majeure de la
défense du pays au moment de l’attaque du Hamas. Netanyahou et
ses alliés seront alors jugés et peut-être qu’un sursaut de
conscience des israéliens permettra de changer radicalement de
stratégie de défense, pour mettre en place la seule chose qui
peut désamorcer le conflit : l’arrêt de la colonisation en
Cisjordanie, et la reprise du dialogue avec l’Autorité
Palestinienne.
7/7 Mais, pour cela, il faudrait qu’arrive au pouvoir en
Israël un gouvernement qui ne soit pas aveuglé par le
messianisme religieux obsédé par Eretz Israël (le « Grand
Israël de la mer au Jourdain »), qui soit capable de
comprendre que ses voisins sont différents et qu’ils ont les
mêmes droits à une souveraineté et à un territoire. Il
faudrait qu’arrive au pouvoir en Israël un gouvernement…
laïque et progressiste, comme à ses débuts. Autant dire que
c’est peu probable. Mais qui sait, il reste une gauche en
Israël.
Publié sur Mastodon le 9 octobre 2023
1/3 Je vois
passer sur ce réseau des sympathies pour l’action terroriste
que le Hamas lance autour de Gaza, au motif qu’#Israël est un
pays qui colonise la #Palestine.
Oui, Israël soutient, depuis sa création, la colonisation de
la Cisjordanie, ce qui est contraire au Droit international.
On peut et on doit critiquer le gouvernement d’Israël pour
cela. On peut même appeler au boycott. Mais cela ne justifie
EN AUCUN CAS des actions de meurtre de masse de civils, qui
sont des crimes terroristes avérés, perpétrés par un groupe
armé qui ne représente pas les palestiniens.
2/3 On ne peut
pas soutenir que des crimes de guerre sont nécessaires pour
lutter contre des crimes coloniaux. Car on ne peut pas faire
ce que l’on reproche à l’adversaire sans perdre toute
crédibilité. Si la colonisation de la Cisjordanie est
illégale, le fait d’attaquer Israël par des actions violentes,
SUR SON SOL DEFINI PAR L’ONU EN 1947, est également illégal,
sur la même base du Droit international.
3/3 Seules des actions de libération contre la
colonisation, menées par les palestiniens SUR LEUR SOL DEFINI
PAR L’ONU EN 1947 sont légitimes, à condition de n’être ni des
crimes de guerre, ni des actions terroristes (= visant en
priorité les civils). Si les palestiniens avaient mené de
telles actions de libération SUR LEUR SOL DEFINI PAR L’ONU EN
1947, au lieu de mener des actions terroristes en territoire
israélien, leur position aujourd’hui serait légitime, et
Israël n'aurait pas pu prendre prétexte de ces attaques pour
renforcer toujours plus sa sécurité.